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Une vendeuse de melons et son t茅l茅phone cellulaire sur un march茅 de fruits et l茅gumes de Nairobi (Kenya) : l鈥檜tilisation de la technologie mobile est en croissance rapide en Afrique, mais reste peu fiable et co没teuse.

Photo: Associated Press / Khalil Senosi

Tard une nuit, Jean L茅onard Karuranga entend du vacarme devant sa maison de Kigali (Rwanda). Ayant trop peur de s鈥檃venturer dehors, il appelle alors avec son t茅l茅phone portable un groupe de s茅curit茅 local qui prot猫ge le quartier des malfaiteurs 脿 la recherche de victimes.

鈥淟e groupe de protection a trouv茅 mon cousin, qui venait d鈥檜ne autre ville pour me rendre visite, bless茅 et perdant son sang devant ma porte. Les voyous l鈥檃vaient poignard茅 et d茅valis茅, raconte-t-il. Nous l鈥檃vons transport茅 d鈥檜rgence 脿 l鈥檋么pital et nous sommes arriv茅s juste 脿 temps. Si je n鈥檃vais pas eu de portable, 莽a aurait 茅t茅 une toute autre histoire. Il a 茅t茅 sauv茅 par ce portable."

M. Karuranga est au nombre des quelque 120 millions d鈥橝fricains qui utilisent un t茅l茅phone (En 1998, ils n鈥櫭﹖aient que 2 millions). Selon un rapport de la London Business School, cette progression est principalement due aux utilisateurs de t茅l茅phones cellulaires. Ce rapport, consacr茅 脿 l鈥檌mpact de la t茅l茅phonie mobile en Afrique, note qu鈥檃u cours des cinq derni猫res ann茅es, c鈥檈st l鈥橝frique qui a connu la croissance la plus rapide du nombre d鈥檃bonnements 脿 la t茅l茅phonie mobile.

Cette progression devrait encore s鈥檃cc茅l茅rer. Vingt-trois pays de l鈥橢st et du Sud de l鈥橝frique ont maintenant mis la derni猫re main 脿 un projet de pose d鈥檜n c芒ble sous-marin susceptible de rendre les co没ts d鈥檜tilisation du t茅l茅phone et de l鈥橧nternet plus abordables. Edmund Katiti, expert de la Commission de l鈥橝frique 茅lectronique, explique que ce projet entre dans le cadre du Nouveau partenariat pour le d茅veloppement de l鈥橝frique (NEPAD).

Int茅grer l鈥橝frique

鈥淟e c芒ble sous-marin permettra au NEPAD de r茅aliser son objectif d鈥檌nt茅grer les pays africains en faisant baisser le co没t des communications, gr芒ce 脿 un r茅seau dont la propri茅t茅 et le fonctionnement seront essentiellement contr么l茅s par des soci茅t茅s africaines, a d茅clar茅 M. Katiti 脿 Afrique Renouveau. L鈥橝frique gaspille plus d鈥檜n milliard de dollars par an en redevances de transfert.鈥� Si quelqu鈥檜n au Mozambique t茅l茅phone en Angola, la communication peut avoir 脿 passer par le Royaume-Uni et la France avant de revenir en Afrique, ce qui gonfle 茅norm茅ment son co没t, remarque-t-il.

Du Kenya, il co没te moins cher d鈥檃ppeler quelqu鈥檜n au Royaume-Uni qu鈥檈n R茅publique d茅mocratique du Congo, note Kai Wulff, le directeur g茅n茅ral de Kenya Data Network, une soci茅t茅 priv茅e. Un r茅seau c芒bl茅 茅tendu ferait baisser le co没t des communications interafricaines d鈥檈nviron 50 %.

La c么te occidentale de l鈥橝frique, du Maroc 脿 l鈥橝frique du Sud, poss猫de d茅j脿 un c芒ble, pos茅 il y a cinq ans.

De m锚me, un c芒ble relie toute la c么te de l鈥橝frique du Nord 脿 la mer Rouge. Ce nouveau syst猫me install茅 sur la c么te orientale de l鈥橝frique constituera le dernier cha卯non permettant d鈥檈ncercler tout le continent d鈥檜n r茅seau de c芒bles de t茅l茅communications, explique M. Katiti.

Pour transmettre voix ou donn茅es, les pays de la c么te orientale de l鈥橝frique doivent actuellement utiliser de co没teux services par satellite. Installer une liaison par satellite co没te environ 5 000 dollars par m茅gaoctet de capacit茅, contre 500 dollars par m茅gaoctet pour la pose d鈥檜n c芒ble 脿 fibre optique. Ces c芒bles, fabriqu茅s en fibre de verre, utilisent des impulsions lumineuses pour transmettre les messages; ils ont une bande passante plus 茅tendue que les transmissions par satellite et peuvent faire passer simultan茅ment un plus grand nombre d鈥檃ppels et fournir des connexions plus rapides.

Actuellement, explique M. Katiti, 鈥渓es gens apportent un journal avec eux quand ils vont dans un caf茅 Internet. Ils lisent un article pendant le t茅l茅chargement de la page et en attendant que la page suivante s鈥檕uvre. Mais avec cette nouvelle technologie, ils cliquent et la page appara卯t."

Le c芒ble est sous-marin pour des raisons de s茅curit茅, car il sera ainsi moins expos茅 au vol et aux听d茅pr茅dations. Baptis茅 Syst猫me de c芒ble sous-marin d鈥橝frique de l鈥橢st, EASSy (East African Submarine Cable System) s鈥櫭﹖endra sur 9 900 kilom猫tres de Durban en Afrique du Sud 脿 Port Soudan au Soudan. On estime son co没t 脿 300 millions de dollars.

Les pays situ茅s sur le littoral seront directement branch茅s sur le c芒ble et serviront de points de transmission pour les pays enclav茅s. La plupart de ces pays poss猫dent d茅j脿 un r茅seau de t茅l茅communications, mais ils pourraient devoir en am茅liorer les capacit茅s, note Issa Semtawa, le directeur des communications de la Compagnie des t茅l茅communications de Tanzanie. 鈥淐e c芒ble apportera des capacit茅s 茅tendues 脿 nos pays, souligne-t-il. C鈥檈st 脿 nous de nous pr茅parer 脿 exploiter au maximum ces capacit茅s.鈥�

鈥楲es choses doivent changer鈥�

La mise en place du c芒ble a 茅t茅 bloqu茅e pendant pr猫s de quatre ans. Les responsables concern茅s expliquent qu鈥檌l leur a fallu du temps pour parvenir 脿 un consensus sur la meilleure mani猫re de financer le projet, afin de faire en sorte que les consommateurs aient acc猫s 脿 cette technologie au co没t le moins 茅lev茅 possible.

鈥淣ous essayons d鈥櫭﹙iter que ce projet devienne la propri茅t茅 d鈥檜ne soci茅t茅 enregistr茅e ailleurs,鈥� a comment茅 Sammy Kirui, responsable du secr茅tariat de l鈥橢ASSy. Les parties prenantes au projet le financeront ensemble, mais tous les op茅rateurs de t茅l茅communications agr茅茅s pourront acheter ses services au m锚me prix que les investisseurs.

Les experts estiment que, s鈥檌l n鈥檈st pas utilis茅 correctement, le nouveau c芒ble pourrait signifier une occasion manqu茅e. Anriette Esterhuysen, directrice g茅n茅rale de l鈥橝ssociation for Progressive Communications, note qu鈥檈n Afrique de l鈥橭uest le c芒ble n鈥檃 pas apport茅 la baisse esp茅r茅e des co没ts pour les usagers, car le syst猫me est largement contr么l茅 par des monopoles 茅tatiques qui font obstacle 脿 la libre concurrence.

Selon M. Katiti, le projet EASSy permet d鈥檈sp茅rer que la 鈥渇racture num茅rique鈥� dont souffre actuellement l鈥橝frique pourra un jour 锚tre combl茅e. La situation actuelle, dit-il, r茅v猫le un 鈥減aradoxe qui fait que le continent le plus pauvre paie les tarifs de communication les plus 茅lev茅s. 鈥淎vec le c芒ble sous-marin et une bonne politique r茅gionale, nous pouvons affirmer que la situation est intol茅rable et que les choses doivent changer."