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Propulsées par le numérique, les musiques urbaines africaines sont en plein essor

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Propulsées par le numérique, les musiques urbaines africaines sont en plein essor

Entre rythmes captivants et innovations technologiques, les plateformes de streaming révolutionnent l'industrie musicale du continent.
Franck Kuwonu
Afrique Renouveau: 
26 Décembre 2024
Nichika Sakurai/Unsplash
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De Jerusalema, qui a rassemblé le monde au milieu d'une pandémie, aux succès planétaires de Rema, Burna Boy et CKay, les musiques africaines sont à la conquête de la scène mondiale. Grâce aux plateformes numériques et à la notoriété croissante des deux genres les plus en vogue, l'afrobeats et l'amampiano, les artistes africains se réinventent et s'ouvrent des horizons économiques et culturels.

Il s'est répandu comme une traînée de poudre et a pris le monde d'assaut. Des rues de Johannesburg aux des bouts du monde, des jeunes de Luanda, la capitale de l'Angola, aux montagnes de Montego Bay, en Jamaïque, des gens de tous horizons se joignirent à un défi mondial de danse sur les médias sociaux, au son de Jerusalema, le tube de Master KG et Nomcebo Zikode, deux jeunes artistes sud-africains.

Le rythme était captivant, la mélodie simple, et cette simplicité et ce dynamisme du tube semblaient appropriés à une période d'anxiété et d'incertitude - au milieu de la crise du COVID - où, malgré ou peut-être en raison des restrictions de mouvement et des limites imposées aux contacts physiques, les gens avaient besoin de se connecter, de se sentir ensemble.

La chanson se prêtait bien à ce mouvement de divertissement collectif - une sorte de danse en ligne conga, où les danseurs se suivent en cercle dans une atmosphère bon enfant », faisait remarquer Laurent Lalanne, ancien instructeur de kizomba en France, dans une interview accordée à Afrique Renouveau.

Un succès mondial

Avec ses milliards d'utilisateurs, TikTok a joué un rôle crucial dans l'amplification du tube grâce à des défis de danse.

Depuis, la plateforme est devenue un tremplin pour de jeunes talents tels que Tyla ou des artistes plus confirmés comme Burna Boy, Wizkid et Tems. Ils se servent des technologies numériques pour atteindre un public international.

Les plateformes numériques aident les jeunes artistes africains à s'autoproduire, à conquérir un public mondial et à créer des opportunités économiques et d'emploi sur le continent.

Aujourd'hui, les musiques urbaines du continent, avec des rythmes comme l'Amampiano et l'Afrobeats, sont à l’aussaut des marchés du monde entier.

Cet essor mondial doit son succès à des approches traditionnelles telles qu'une large diffusion à la radio, des concerts en direct et la participation à des festivals de musique internationaux. La radio demeurant un média dominant dans la majeure partie du continent, cela permet aux artistes de se constituer une solide base de fans au niveau national. De même, les concerts et les tournées permettent de toucher un public enthousiaste et de créer des expériences uniques avec des fans inconditionnels, tandis que les collaborations avec des DJ permettent à la musique d'atteindre des clubs et des espaces sociaux dans le monde entier.

Cependant, au cœur de ces approches se trouvent les canaux de la révolution numérique, qui facilitent la production, la diffusion et la consommation de la musique.

À cet égard, Calm Down de Rema, extrait de l'album Rave & Roses, a connu un énorme succès mondial en 2022, amplifié par un remix avec Selena Gomez qui a atteint la 3ᵉ place du Billboard Hot 100 et a dominé le classement Afrobeats américain pendant 41 semaines.

De son côté, CKay est entrée dans l'histoire avec Love Nwantiti (2019) qui, grâce à ses multiples remixes, a conquis les charts mondiaux et dépassé le milliard d'écoutes sur Spotify, devenant un hymne planétaire.

En 2022, Libianca toucha les coeurs tout en sensibilisant le public à la santé mentale avec People, une ballade inspirée de son combat contre la cyclothymie. People domina les charts en Europe et dans d'autres régions.

Burna Boy, déjà une star, a confirmé son influence avec Last Last et On the Low, deux succès internationaux qui mettent en valeur son style unique d'afro-fusion.

Puis, Peru de Fireboy DML, avec Ed Sheeran, et Ku Lo Sa d'Oxlade, ont illustré l'ascension rapide de l'afrobeats sur la scène musicale mondiale.

Le « streaming » numérique génère plus de revenus

D'autres plateformes telles que YouTube, Spotify, Apple Music, Deezer, Mdundo et Boomplay permettent aux artistes de produire, distribuer et promouvoir leur musique sans passer par les labels traditionnels.

Kabza De Small, figure de l'amampiano sud-africain, a débuté en publiant ses morceaux sur SoundCloud, illustrant ainsi la manière dont le numérique abaisse les barrières à l'entrée.

« J'ai bénéficié d'une plus grande exposition, notamment au-delà du continent, une fois que j'ai publié mes morceaux sur Spotify », a déclaré Kossi Mawun, batteur de jazz togolais, à Afrique Renouveau.

Les revenus générés sur le continent par la musique numérique en streaming devraient atteindre 500 millions de dollars d'ici 2025, contre seulement 100 millions de dollars en 2017, selon des chiffres cités par la Banque mondiale.

En 2023, l'IFPI, la Fédération internationale de l'industrie phonographique, a constaté que l'Afrique subsaharienne continue de connaître la croissance la plus rapide de toutes les régions et est la seule à dépasser les 20 % de croissance. Les revenus, selon le dernier rapport de l'IFPI, ont augmenté de 24,7 %.

Cette augmentation est principalement due à la croissance des revenus de la diffusion payante.

Cette évolution des musiques urbaines du continent illustre la dynamique de l'industrie créative africaine.

Au-delà de la musique, le numérique dans les industries créatives profite directement à la nouvelle génération, dont l'Union africaine et l'OCDE estiment qu'environ 70 % des emplois créés profitent aux jeunes de moins de 30 ans.

Le succès de l'industrie musicale stimule des secteurs connexes tels que l'événementiel, le tourisme et la mode, notamment l'Ama Fest, le plus grand festival Amampiano d'Afrique du Sud, et l'Afro Nation, un festival Afrobeats annuel itinérant qui se tient dans les grandes villes du monde entier.

Malgré cet immense potentiel, l'accès à une infrastructure numérique fiable reste un obstacle pour de nombreux artistes.

Copyright

Il n'est pas rare de voir des artistes moins connus copier complètement des lignes de basse, des riffs ou des rythmes, en changeant simplement les paroles, les mélodies ou la langue de leurs morceaux. Cette tendance croissante s'explique par l'existence de beatmakers facilement accessibles en ligne.

Pour endiguer ce phénomène, l'OMPI propose CAPASSO, une initiative panafricaine destinée à gérer les droits mécaniques des compositeurs et des éditeurs de musique, en délivrant des licences, en protégeant leurs œuvres et en percevant les revenus auxquels ils ont droit.

Mais comme le souligne Kossi Mawun, la technologie numérique reste un atout - il suffit de savoir en tirer le meilleur parti. « Personnellement, cela m'a aidé », dit-il, “parce qu'en tant qu'artiste indépendant, faisant de la musique qui n'est pas très tendance, je me suis d'abord fait connaître sur les plateformes numériques”.