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Le patron de Facebook en veut plus

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Le patron de Facebook en veut plus

Malgré tout, la visite de Zuckerberg au Kenya et au Nigéria inspire les technophiles
Eleni Mourdoukoutas
Facebook CEO Mark Zuckerberg (in grey T-shirt) meeting with entrepreneurs and developers in Nairobi, Kenya.     Facebook/Mark Zuckerberg
Photo: Facebook/Mark Zuckerberg
Le PDG de Facebook Mark Zuckerberg (T-shirt gris) rencontre des entrepreneurs et des développeurs à Nairobi, au Kenya. Photo: Facebook/Mark Zuckerberg

La croissance exponentielle de Facebook en Afrique attire l’attention. En septembre dernier, Mark Zuckerberg, fondateur et PDG de Facebook, s’est rendu au Kenya et au Nigéria, deux pays qui figurent parmi les cinq principauxÌý utilisateurs du réseau social sur le continent.

Selon le site Internet World Stats, en juin 2016, le Nigéria comptait 16 millions d’utilisateurs actifs de Facebook et le Kenya 5,5 millions. Il n’est donc pas surprenant que Mark Zuckerberg dirige ses efforts vers les foyers d’innovation technologique en Afrique, là où les jeunes entrepreneurs du secteur cherchent à s’inspirer des succès du magnat des réseaux sociaux.

Lors de son premier déplacement surprise en Afrique subsaharienne, il a rencontré des « Afropreneurs » – ces jeunes entrepreneurs africains qui débordent d’idées novatrices, sont animés d’une vraie passion pour le changement et contribuent par leur créativité à résoudre les problèmes du continent, ce qui fait que leurÌý popularité ne cesse de croître. Mark Zuckerberg s'estÌý renduÌý dans quelques-uns des plus importants centres technologiques du Nigéria et du Kenya et beaucoup de ces Afropreneurs ont vu dans saÌý visite une preuve de l’impact de leur travail au niveau mondial.

Inspiré par le succès du M-Pesa kényan –Ìýun portefeuille mobile qui permet à ses utilisateurs de mettre de l’argent sur un compte géré avec leurs téléphones et de faire des paiements par SMS sécurisés – M. Zuckerberg a visité iHub, un centre d’innovation de Nairobi destiné à la communauté technophile et où les entrepreneurs développent et testent leurs idées.Il y a rencontré deux ingénieurs qui ont conçuÌý un système de paiement mobile appelé PayGo Energy, utilisé pour acheter du gaz domestique. Pour le dirigeant de Facebook, ces deux ingénieurs, Fausto Marcigot et Mark O’Keefe, sont une source d’inspiration pour le reste du monde, car ils ont su penser comment l’argent mobile pouvait à la fois bénéficier au développement des entreprises et aux communautés.

À Lagos, M. Zuckerberg a discuté avec les développeurs d’Andela, une start-up qui forme des développeurs de logiciels et leur propose des postes à plein temps auprès d’entreprises internationales. Avec eux, il a non seulement évoqué les obstacles dont souffrent les concepteurs de logiciels africains, mais aussi les moyens de les connecter avec les entreprises du monde entier. En juin 2016, Andela a reçu un don de 24 millions de dollars de l’Initiative Chan Zuckerberg (CZI).

« Nous vivons dans un monde où le talent est réparti uniformément, mais pas les opportunités. La mission d’Andela est de combler ce fossé », a déclaré M. Zuckerberg à Lagos.

Depuis sa fondation il y a deux ans, Andela a formé plus de deux cents ingénieurs sélectionnés parmi 40 000 candidats. Jeremy Johnson, le PDG, a déclaré au magazine d’affaires américain Entrepreneur que la start-up s’était engagée à former 100 000 ingénieurs dans les dix prochaines années. Afin d'accroître la coopérationÌý avec les entrepreneurs africains, Facebook a créé Express Wi-Fi,pour pouvoir offrirÌý du Wifi de bonne qualité à des prix abordables aux communautés mal desservies tout en valorisant l’offre des entrepreneurs africains. Grâce à Express Wi-Fi, les entrepreneurs africains disposeront des équipements et logiciels qui leur permettront de vendre des données Internet en s’octroyant 15% de commission.

« La visite de Mark a validé les efforts immenses mais trop souvent méconnusÌý des jeunes Nigérians et récompensé leur persévérance auÌý travail », a déclaré Idris Ayodeji Bello, qui se présentait comme un Afropreneur nigérian, à la chaîne d’information CNN.

Tout le monde n’était pourtant pas aussi convaincu par la tournée africaine de Mark Zuckerberg. Certains ont vu dans cette visite un moyen pour le PDG de Facebook de se faire une idée de l’étendue de son empire en Afrique tout en défendant les intérêts de son entreprise, d'autant plus que le nombre d’abonnés sur le continent aÌý augmenté de 732,8% entre 2010 et 2016, soit plus que dans n’importe quelle autre région du monde sur la même période.

En 2015, environ 65% des Nigérians interrogés dans le cadre d’une enquête de la plateforme de sondage mobile GeoPoll en convenaient : « Facebook c'est Internet. »

Nombreux sont ceux qui soulignent aussi qu’au Kenya, Mark Zuckerberg a rencontré Joseph Mucheru, le Secrétaire du Cabinet du Ministre de l’Information et des Communications – preuve selon eux de l’intention de l’entrepreneur américain de glaner des soutiens pour son entreprise.

Mariéme Jamme, une entrepreneur du secteur technologique sénégalais et cofondatrice de Africa Gathering, une plateforme mondiale destinée aux entrepreneurs qui veulent partager leurs idées sur le développement en Afrique, a ainsi lancé sur Twitter: « [Mark Zuckerberg] sait que [l’Afrique] est une question de chiffresÌý et d’accès ! Gardons la tête haute, recherchons la collaboration plutôt que la validation. »

Des voix se sont également élevées pour attaquerÌý Free Basics, une plateforme conçue dans le cadre de l'Initiative Chan Zuckerberg pour fournir un accès gratuit à Internet pour les téléphones mobiles dans les communautés défavorisées. Selon ces critiques, l’initiative n’offre un accès gratuit qu’à une poignée de sites privilégiés et viole donc le principe fondamental de la neutralité du Web (selon lequel les fournisseurs d’accès à Internet doivent donner accès au contenu et aux applications sans favoriser niÌý bloquer certains sites) dans les 23 pays africains où elle a été introduiteet parmi lesquelsÌý figurent la République démocratique du Congo, le Kenya, la Mauritanie, le Nigéria ou encore l’Afrique du Sud.

En outre, si l’accès gratuit à Internet n'est offert que sur certains sites, ces critiques estiment que Facebook est dans une position de gardien de cet accès, car il obligeÌý les sites participants à se conformer à certaines « caractéristiques techniques » fixées par le réseau social, comme la taille des images, les mini-applications et le formatage des polices.

Evelyn Namara, une technophile ougandaise spécialisée dans la jeunesse et l’entrepreneuriat, et qui travaille pour l’ACSIS, l’African Civil Society for the Information Society (Société civile africaine pour la société de l’information) a ainsi tweeté : « Je ne suis franchement pas ravie de sa visite, sachant que son programme #freebasics se fait au détriment de l’innovation. »

D’autres encore ont été choqués par le discours quelque peu fleuri sur l’esprit d’entreprise que M. Zuckerberg a tenu au Kenya et au Nigéria. Le jeune journaliste kényan Larry Madowo a même qualifié son approche d’« extrêmement condescendante ».

Le magnat des médias sociaux n'a pas vraiment abordéÌý les questions de financement, que les entrepreneurs considèrent comme leur principal défi. Selon la Société financière internationale (SFI), qui fait partie du Groupe de la Banque mondiale, ce ne sont pas moins de huit petites et moyennes entreprises africaines sur dix qui ne disposent pasÌý de fondsÌý suffisants.

Mais pendant que le jury continue de délibérer sur les motifs et l’impact de la tournée africaine de Mark Zuckerberg, il ne fait guère de doute que ce dernier est parvenu à saisir l’esprit « Afropreneurial »Ìýcar l a affirméÌý : « C'est en AfriqueÌý que l’avenir se construira ». Ìý

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