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Réflexion mondiale sur le génocide rwandais

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Réflexion mondiale sur le génocide rwandais

M. Annan préconise des mesures qui permettront de prévenir les tragédies à l'avenir
Afrique Renouveau: 
Le Secrétaire général dépose une gerbe sur l'un des lieux du génocide à Mwurire (Rwanda) au cours d'une visite en 1998. Photo : ©ONU / Département de l'information
Photo : ©ONU / Département de l'information
Le Secrétaire général dépose une gerbe sur l'un des lieux du génocide à Mwurire (Rwanda) au cours d'une visite en 1998. Photo : ©ONU / Département de l'information

Dix ans après l'un des génocides les plus atroces du XXe siècle, le Rwanda n'a toujours pas fini de remettre sur pied sa société ravagée. De son côté, le Secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, exhorte la communauté internationale à faire le nécessaire pour éviter qu'une catastrophe de même nature ne se produise ailleurs dans le monde. Le 7 avril -- date anniversaire du début des massacres de 1994 au Rwanda -- il exposera les grandes lignes d'un plan d'action que l'ONU a mis au point afin de prévenir les génocides.

"Il ne peut y avoir d'obligation plus impérieuse pour la communauté internationale que la prévention du génocide", a fait observer M. Annan en février dernier. "Les événements qui se sont produits au Rwanda il y a 10 ans sont particulièrement révoltants. La communauté internationale qui avait sans aucun doute les moyens de les empêcher n'en a pas eu la volonté. . . Nous devons veiller à ne plus jamais manquer de volonté."


Le Secrétaire général dépose une gerbe sur l'un des lieux du génocide à Mwurire (Rwanda) au cours d'une visite en 1998.

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Photo : ©ONU / Département de l'information


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L'un des éléments essentiels de ce plan sera la nomination par l'ONU d'un nouveau conseiller spécial pour la prévention des génocides. Ce conseiller aura pour mission de recueillir des informations sur les crises pouvant déboucher sur des actes de génocide, d'avertir de l'imminence d'une catastrophe et de recommander au Secrétaire général et au Conseil de sécurité des possibilités d'action.

Le plan d'action de l'ONU, qui s'inspire des recommandations faites en 1999 par une commission d'enquête indépendante sur le génocide rwandais présidée par l'ancien Premier Ministre de la Suède, Ingvar Carlsson, mettra à contribution le système des Nations Unies tout entier. De nombreux éléments d'un tel plan ont déjà été mis en place et l'ONU a notamment modifié la manière dont elle réagit face aux conflits armés.

Par ailleurs, depuis le génocide qui a été commis au Rwanda, l'ONU a tendance à agir de façon préventive en cas de violations massives des droits de l'homme, qui sont souvent les signes avant-coureurs d'un génocide. Comme l'a déclaré M. Annan à Stockholm le 26 janvier lors d'un forum international, "Nous devons nous attaquer aux causes profondes de la violence et des génocides : l'intolérance, le racisme, la tyrannie et le discours public déshumanisant qui nient la dignité et les droits de groupes entiers. Nous devons en particulier protéger les droits des minorités, qui sont les plus souvent visées".

100 jours d'horreur

Le génocide rwandais a débuté le 7 avril 1994. La veille, un avion transportant les Présidents du Rwanda et du Burundi avait été abattu alors qu'il s'apprêtait à atterrir à Kigali, capitale du Rwanda. Au cours des 100 jours qui suivirent, quelque 800Ìý000 Rwandais furent massacrés. Le génocide se fit de manière très organisée, avec la participation directe de hauts fonctionnaires de l'Etat et de représentants du parti au pouvoir. Des membres de milices, les forces armées et des civils se livrèrent à d'inqualifiables atrocités, dirigées principalement contre la minorité ethnique tutsie mais aussi contre les membres de la majorité hutue qui refusaient de participer au massacre ou appartenaient aux partis d'opposition.

Le génocide a été perpétré sous les yeux de la communauté internationale. Une opération de maintien de la paix -- la Mission des Nations Unies pour l'assistance au Rwanda (MINUAR) -- se trouvait sur le terrain avec quelque 2Ìý000 hommes qui, à l'origine, avaient été envoyés pour superviser la mise en oeuvre d'un accord de paix conclu en août 1993 entre le gouvernement et les forces rebelles du Front patriotique rwandais (FPR) établi en Ouganda.

Une fois le génocide déclenché, 10 casques bleus belges furent tués alors qu'ils essayaient de protéger le Premier Ministre Agathe Uwilingiyimana qui, elle aussi, fut assassinée. Boutros Boutros-Ghali, qui était alors Secrétaire général de l'ONU, proposa trois options au Conseil de sécurité : renforcer la MINUAR, réduire ses effectifs ou la retirer entièrement. Le Conseil de sécurité vota en faveur d'une réduction des effectifs de la MINUAR, portés de 2 000 hommes à 270. Ce n'est qu'au milieu du mois de mai que le Conseil revint sur sa décision et vota en faveur de l'envoi de quelque 5 500 casques bleus. Peu d'entre eux arrivèrent avant la fin des massacres en juillet, au moment de la prise du pouvoir par le FPR, à majorité tutsie.

Le rapport de la Commission Carlsson conclut par la suite : "Si l'Organisation des Nations Unies n'a pas pu empêcher et arrêter le génocide au Rwanda, la responsabilité en incombe à plusieurs acteurs, en particulier le Secrétaire général, le Secrétariat [de l'ONU], le Conseil de sécurité, la MINUAR et les Etats Membres de l'Organisation."

Le jour de la parution du rapport, M. Annan -- qui dirigeait les opérations de maintien de la paix de l'ONU au moment du génocide -- déclara: "Nous regrettons tous amèrement de ne pas avoir fait plus pour prévenir ce crime... Au nom de l'Organisation, je reconnais cet échec et exprime mes profonds remords."

Un rétablissement difficile

Au Rwanda même, le 10e anniversaire du génocide sera l'occasion de réfléchir au génocide et au processus de redressement politique et économique des 10 dernières années.

La réconciliation nationale ne s'est pas faite sans mal, quelque 80 000 personnes soupçonnées de crime de génocide se trouvant toujours en détention provisoire. Nombre d'entre elles seront jugées par des tribunaux communautaires locaux connus sous le nom de gacacas, dont près de 800 s'acquittent actuellement de leur tâche. A l'heure actuelle, le Tribunal pénal international pour le Rwanda, qui siège à Arusha (Tanzanie), poursuit en justice ou instruit quelque 200 affaires parmi les plus graves, impliquant des instigateurs présumés du génocide.

Dans la ville de Cyangugu, pratiquement déserte après le massacre de quelque 50 000 Tutsis en 1994, les Rwandais "comprennent à présent qu'il leur faut vivre ensemble, travailler ensemble et reconstruire leur pays ensemble," a déclaré le Gouverneur de la province de Cyangugu, Musa Fazil Harerimana, à l'agence de presse suisse, Hirondelle. La ville elle-même revient à la vie. Elle s'est dotée de nouvelles écoles, d'hôtels et de marchés débordant d'activités. Les plantations de thé et de café qui avaient été abandonnées atteignent des niveaux de production presque semblables à ceux d'avant 1994.

Selon des données du Fonds monétaire international, l'économie du Rwanda a connu une reprise importante une fois la paix rétablie, avec une croissance annuelle de 15 % en moyenne entre 1995 et 1999 et de 7,4 % entre 2000 et 2002 -- ce qui est bien supérieur à la croissance moyenne de l'Afrique subsaharienne en général.

"Aujourd'hui, le Rwanda a beaucoup à apprendre à la communauté internationale pour ce qui est de faire face au fardeau du passé et de relever le défi que constitue le rétablissement", a fait observer le Secrétaire général, M. Annan. "Il montre qu'il est possible de dépasser la tragédie et de faire renaître l'espoir."

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