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Les gouvernements d'Afrique australe sont confront茅s 脿 un dilemme : laisser leurs populations mourir de faim ou leur offrir une aide alimentaire g茅n茅tiquement modifi茅e que beaucoup soup莽onnent d'锚tre mauvaise pour la sant茅.

Tel 茅tait le choix des gouvernants appauvris de la r茅gion lorsque le Programme alimentaire mondial (PAM) leur a propos茅 des milliers de tonnes d'aide alimentaire d'urgence afin de lutter contre le spectre de la famine. Cette aide provenait de pays donateurs, comme les Etats-Unis, qui produisent de vastes quantit茅s de ma茂s et d'autres c茅r茅ales g茅n茅tiquement modifi茅es (GM).

Les champs dess茅ch茅s de Zambie : L'aide alimentaire g茅n茅tiquement modifi茅e pr茅sente-t-elle des risques pour la sant茅 ?

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Photo: 漏PAM / Brenda Barton

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Plusieurs gouvernements de la r茅gion ont refus茅 publiquement ce type de c茅r茅ales, notamment le Zimbabwe et la Zambie, pays pourtant les plus touch茅s par la s茅cheresse. Evoquant des raisons sanitaires et environnementales, le Zimbabwe a tout simplement interdit l'entr茅e de ces produits sur son territoire. La Zambie, qui avait d茅j脿 re莽u plusieurs livraisons de ce type, les a mises sous clef, en a interdit la distribution et refus茅 l'arriv茅e pr茅vue de 40 000 tonnes suppl茅mentaires.

Incertitude scientifique

En Zambie, l'interdiction des produits alimentaires GM a 茅t茅 annonc茅e apr猫s des mois de vifs d茅bats. Les associations de d茅fense de l'environnement et d'autres groupes "de surveillance", m茅fiants 脿 l'茅gard des organismes g茅n茅tiquement modifi茅s (OGM), ont pes茅 lourd dans ce d茅bat et exerc茅 des pressions sur les autorit茅s par le biais de leurs r茅seaux de contacts, de rassemblements publics et de manifestations. Des membres de groupes de citoyens et des scientifiques zambiens se sont rendus aux Etats-Unis, en Inde, en Afrique du Sud et en Europe pour enqu锚ter sur la question des modifications g茅n茅tiques. "Ce voyage d'茅tudes nous a permis de conclure que les OGM pr茅sentent des dangers pour la sant茅", ont-ils d茅clar茅 脿 leur retour.

De nombreux Zambiens pensent en effet que les OGM provoquent une r茅sistance aux antibiotiques, r茅duisant ainsi le niveau d'immunit茅 contre les maladies, et contribuent 脿 l'apparition de nouvelles toxines alimentaires et d'allergies chez les personnes de sant茅 fragile. "En Zambie, l'茅tat de sant茅 des populations des r茅gions 茅loign茅es est moyen. Si leur consommation [de c茅r茅ales OGM] s'accro卯t, le taux de toxicit茅 augmentera d'autant", estime le docteur Mwananyanda Mbikusita-Lewanika, scientifique zambien.

Les partisans des produits alimentaires g茅n茅tiquement modifi茅s r茅torquent qu'il n'y a aucune preuve concr猫te que les OGM soient mauvais pour la sant茅. M锚me ceux qui n'en sont pas certains, comme le docteur Tewolde Berhan G. Egziahber, scientifique 茅thiopien et 茅minent n茅gociateur africain des questions de biodiversit茅 et de bios茅curit茅, affirment que l'imminence de la famine exige des actions imm茅diates. "Les effets 脿 court terme de la malnutrition, conjugu茅s aux ravages du VIH/sida, sont plus graves que les effets 脿 long terme pr茅sum茅s des produits alimentaires GM sur l'organisme", dit-il.

Face aux pr茅occupations exprim茅es en Afrique australe, le PAM, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture et l'Organisation mondiale de la sant茅 ont publi茅 une d茅claration conjointe en ao没t 2002, affirmant que "la consommation de produits alimentaires qui contiennent des OGM, distribu茅s sous la forme d'aide alimentaire 脿 l'Afrique, ne semble pas pr茅senter de dangers pour la sant茅. En cons茅quence, ces produits sont comestibles". Les institutions de l'ONU ont toutefois pris le soin d'ajouter qu'il appartenait 脿 chaque pays b茅n茅ficiaire d'accepter ou de refuser ce type de produit.

Les d茅tracteurs des OGM ont exprim茅 une autre crainte : les risques de contamination que pr茅senteraient les grains g茅n茅tiquement modifi茅s pour les cultures locales ; ce ph茅nom猫ne est connu sous le terme scientifique "d'hybridation". A leur avis, une telle 茅ventualit茅 risquerait en outre de nuire aux exportations agricoles de la r茅gion vers l'Union europ茅enne qui, tr猫s rigoureuse en mati猫re d'exp茅rimentation avec les OGM, interdit souvent l'importation de ces organismes.

Pour r茅pondre 脿 cette pr茅occupation, certains pays d'Afrique, dont le Lesotho et le Mozambique, ont commenc茅 脿 moudre des c茅r茅ales GM, afin que ce type de grains ne puisse s'introduire dans les syst猫mes agricoles locaux et ne puisse qu'锚tre consomm茅. Plusieurs pays donateurs ont m锚me propos茅 d'assumer les frais de mouture, comme l'Afrique du Sud, seul pays de la r茅gion producteur 脿 grande 茅chelle d'OGM. Ces initiatives ont eu pour cons茅quence l'assouplissement de la position initiale du Zimbabwe, qui a commenc茅 脿 autoriser l'importation des c茅r茅ales GM, 脿 condition qu'elles arrivent 脿 l'茅tat moulu. En revanche, la Zambie n'a pas chang茅 d'avis.

"Les Zambiens ne sont pas des cobayes"

Bien que pr猫s de 30 % des 10,2 millions d'habitants de la Zambie soient menac茅s par la famine, le Gouvernement du Pr茅sident Levy Mwanawasa a c茅d茅 脿 la peur des modifications g茅n茅tiques et a refus茅 d'autoriser l'importation de c茅r茅ales GM. Le Pr茅sident lui-m锚me a r茅it茅r茅 son refus d'administrer 脿 ses compatriotes un "poison" pouvant avoir des effets 脿 long terme, tant qu'il ne disposerait pas de donn茅es suffisantes et cr茅dibles pour le convaincre du contraire.

Les autorit茅s zambiennes ont exprim茅 leur intention de s'en tenir au "principe de prudence", qui stipule qu'en cas d'incertitude scientifique, un pays doit s'abstenir d'adopter des mesures qui risquent de compromettre la sant茅 humaine ou animale ou de nuire 脿 l'environnement. Affirmant qu'elle ne disposait pas 脿 l'heure actuelle de connaissances technologiques suffisantes en mati猫re d'OGM, l'administration zambienne a toutefois cr茅茅 un groupe charg茅 d'茅tudier la question.

En attendant, le Pr茅sident Mwanawasa a invit茅 ses compatriotes 脿 se montrer "patients" pendant que les autorit茅s s'efforcent d'obtenir une aide alimentaire non GM. "Je ne permettrai jamais que les Zambiens servent de cobayes, quelle que soit l'ampleur de la crise alimentaire", a-t-il d茅clar茅. Le Ministre de l'agriculture et des coop茅ratives, Mundia Sikatana, a opin茅 : "Nous aurons de bons produits alimentaires pour nos concitoyens, qu'il nous sera possible de garantir. On ne devrait pas 锚tre forc茅s d'accepter quoi que ce soit.

Pourtant, l'opinion publique zambienne n'est pas unanime sur la question. Des responsables politiques de l'opposition et des repr茅sentants d'organisations non gouvernementales estiment que la priorit茅 absolue devrait 锚tre la lutte contre la famine. Ils font valoir que les Zambiens consomment d茅j脿 des produits alimentaires GM import茅s d'Afrique du Sud que l'on trouve sur les 茅tag猫res de tous les supermarch茅s du pays.

"La souffrance est r茅elle"

Malgr茅 la pol茅mique, le PAM continue 脿 proposer une aide alimentaire GM aux pays dans le besoin. "Tant que ces produits sont garantis par le pays donateur et accept茅s par le pays b茅n茅ficiaire, le PAM poursuivra leur distribution", ont indiqu茅 les repr茅sentants de l'Agence alimentaire. Et de souligner qu'ils distribuent des produits analogues dans d'autres r茅gions depuis un certain temps, et m锚me en Afrique australe depuis 1992-1993, sans qu'il y ait eu de victimes ou de cons茅quences f芒cheuses 脿 d茅plorer.

Avec 2,9 millions de Zambiens environ en situation de famine, le PAM a implor茅 le Pr茅sident Mwanawasa de revenir sur sa position, affirmant que le rejet des produits alimentaires GM r茅duirait les secours d'urgence disponibles et risquerait de d茅sorganiser les circuits alimentaires humanitaires.

"La souffrance des populations est r茅elle", a d茅clar茅 Richard Regan, chef du Bureau local du PAM, 脿 l'occasion du lancement par l'ONU d'un appel pour une aide alimentaire d'urgence de 71,4 millions de dollars pour la Zambie. "Il nous faut agir maintenant, et concr猫tement", a-t-il dit.

Certains estiment que le d茅bat devrait d茅passer le cadre des secours d'urgence 脿 court terme. A leur avis, la communaut茅 internationale devrait accorder une attention particuli猫re au d茅veloppement agricole, pour garantir la s茅curit茅 alimentaire du continent 脿 long terme. Ce qui a fait dire 脿 la Genetic Resources Action International (GRAIN), organisation internationale active dans la promotion du d茅veloppement durable et de la biodiversit茅 agricole, que "la question n'est pas de savoir si quelques sacs de ma茂s GM s猫meront la mort parmi les populations d'Afrique australe, mais plut么t si la communaut茅 internationale est dispos茅e 脿 aider les agriculteurs africains 脿 subvenir aux besoins de leurs familles et de leurs communaut茅s, tout en maintenant leur int茅grit茅".

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*听Mercedes Sayagues, en Afrique du Sud, a 茅galement contribu茅 脿 l'article.